La sophrologie et l'angoisse

par Sarah-Jane Ennis

En ces temps particuliers que nous traversons, l’angoisse émerge chez de plus en plus de personnes et cela peut s’expliquer par la rencontre entre nos désirs et l’interdit. Confinement, couvre-feu, stratégie du « stop and go », s’opposent à un désir, voire un besoin fondamental de liberté. 

Je ne vais pas développer dans cet article le concept du « surmoi » mais quand la pulsion de vie, le désir, vient se confronter à l’interdit, la loi, et dans le cas de la Covid, à l’entrave de certaines de nos libertés, l’angoisse émerge. La grande majorité d’entre nous sommes repliés sur nous-mêmes (l’hiver favorise d’autant plus ce mouvement vers l’intérieur), ce qui laisse plus d’espace à l’émergence des messages de l’inconscient via les symptômes d’angoisse.  S’opère alors une sorte de court-circuit intérieur qui favorise la remontée d’angoisses archaïques et originelles (collectives ou propres à chacune, chacun).

D’où l’importance d’écouter les messages d’alerte de son corps.

L'ANGOISSE :

L’angoisse est caractérisée par une sensation de grande inquiétude, de crainte irrépressible, de menace imminente, d’alerte psychique avec des manifestations symptomatiques physiques telles que la sensation d’étouffement, l’oppression au niveau du thorax, la sudation, l’accélération du rythme cardiaque, les vertiges, les maux de ventre, les troubles du sommeil, etc. Une crise d’angoisse s’accompagne généralement d’une peur de perdre le contrôle, voire de devenir fou ou de mourir.

Illustration angoisse

L’angoisse peut toucher tout le monde, il semblerait cependant que les femmes en souffrent plus que les hommes.

L’angoisse peut apparaître lors de situations anxiogènes, avec une perte de repères : lors de traversées d’étapes de sa vie, de séparations, de reconversions professionnelles, de changements de vie, de transitions, après un choc etc. 

Elle peut également faire écho à des questionnements autour de l’inconnu et de l’avenir que l’on soit enfant, adolescent ou adulte. Le contexte global que nous traversons, l’instabilité et la peur ambiante peuvent favoriser la montée de l’angoisse.

Ces derniers mois, les demandes autour de la gestion de l’angoisse augmentent radicalement, tant le climat est anxiogène. 

L’angoisse se présente principalement sous deux formes :

-L’angoisse quasi constante, présente en permanence

-La crise aiguë d’angoisse, appelée « crise de panique »

Très souvent, quelle que soit la forme de l’angoisse, j’entends lors de mes séances « c’est inexplicable, c’est arrivé d’un coup sans que je ne sache pourquoi ».

Lorsque que les crises sont à répétition, le sujet tombe dans le cercle vicieux de la peur de faire une crise. L’objectif de l’accompagnement en sophrologie est d’aider à briser ce cercle, faire en sorte que les crises s’espacent de plus en plus puis in fine disparaissent.

La grande difficulté est que l’angoisse est immatérielle, elle est différente de la peur, du stress, ou de la phobie parce que la crise se déclenche à l’intérieur du corps sans être forcément une réponse à un stimuli extérieur. 

L’angoisse est vécue comme une menace qui n’a pas de forme, de contours, parfois pas de sens et c’est bien là tout l’enjeu de l’accompagnement thérapeutique. 

Chaque personne étant unique, l’angoisse peut se manifester de multiples façons, c’est comme une irruption intérieure, parfois psychique, avec des remises en questions constantes, une anticipation permanente de l’avenir et souvent des manifestations somatiques physiques envahissantes.

Les symptômes sont des signes d’alerte qui expriment une souffrance et un conflit intérieur jusque-là inconscient. Il est alors difficile pour l’individu de donner un sens à l’angoisse.

 

Différences entre le stress, la peur et l’angoisse

Le stress est une réponse adaptative à un changement, une contrainte, un événement ou une stimulation provenant de l’environnement. Les mécanismes physiologiques du stress sont toujours les mêmes pour tous les individus : fuir ou combattre.

Le déclenchement et l’intensité d’une réaction au stress peut cependant varier selon les individus ou le contexte : une réaction ne sera pas identique pour un même individu selon le contexte et le moment de la stimulation extérieure.

Le stress est un mécanisme de réponse pouvant provoquer des émotions (dont l’anxiété par exemple).

Le stress et la peur sont des réponses face à des situations concrètes, extérieures, parfois presque tangibles.

Ex : j’ai peur de perdre mon travail, je suis sous stress permanent à la maison, j’ai peur de la maladie.

photo stress travail

L’angoisse, elle, survient la plupart du temps de manière inopinée, avec ces fameuses boules dans la gorge, dans le ventre ou dans le thorax qui privent souvent le corps de sa pleine capacité de respiration. La sensation d’étouffement vient de l’intérieur, elle n’est pas une réponse à un facteur extérieur.

Accueillir l’angoisse 

L’envie première est de se battre contre son angoisse, contre ce qui se passe dans son corps plutôt que d’accueillir le message d’alerte que l’angoisse nous transmet. 

Plus on va chercher une réponse explicite à l’extérieur pour se rassurer (la foule, le bruit … ), plus on va fuir l’angoisse et ce qu’elle représente, plus elle va se manifester.

1/ Mettre des mots sur ce que l’on ressent, ce que l’on traverse. 

En parler, être écouté(e) par ses proches et un professionnel.

Une séance de sophrologie commence toujours par un temps d’échange durant lequel j’accueille la personne pour mieux la contenir, l’accompagner dans la gestion des crises puis leur dépassement.

La verbalisation est absolument essentielle, plus on pose des mots, plus on met du sens et plus on va remettre le corps en mouvement, relancer la circulation intérieure, la respiration, l’évacuation.

On me demande souvent d’expliquer la différence entre psychothérapie et sophrologie.

Schématiquement, une psychothérapie (quelle que soit la forme) va aider à comprendre « pourquoi » ? Un accompagnement en sophrologie va aider sur le « comment avancer et traverser ».

Cependant, lors des entretiens du début de séance de sophrologie, il n’est pas rare qu’un mot posé par la personne que je guide, lui permette de comprendre aussi son pourquoi.

2/ Reconnaître son angoisse, qu’elle soit sourde et présente ou qu’elle se manifeste sous la forme de crises de panique.

Il est essentiel de pouvoir prendre conscience de son état pour mettre en place des outils thérapeutiques via la parole, la respiration, la visualisation, ou encore l’art thérapie.

Reconnaître l’angoisse, c’est entendre qu’elle existe, et chercher une solution à l’intérieur pour la traverser plutôt que de chercher à l’extérieur pour mieux étouffer la crise (et s’étouffer soi-même).

3/ Chaque personne étant unique, les crises se vivent de manière très personnelle. 

Que l’angoisse soit passagère ou handicapante au quotidien chaque individu la traverse à sa manière avec une résonnance qui lui est propre selon son vécu, son développement. 

Je le dis souvent lors de mes séances, chaque personne accueille son propre ressenti « vous êtes la seule personne à être à votre place ici et maintenant ».

4/ Une attaque de panique a un début et une fin

Une crise survient souvent de manière inopinée, sans qu’on s’y attende. Petit à petit, la personne va arriver à reconnaître les manifestations psychiques et corporelles afin de mettre en place ses techniques pour traverser la crise. 

Même si lors de la crise, la peur de perdre le contrôle peut prendre le dessus, il est essentiel de savoir que la crise aura une fin. 

5/ L’angoisse paraît abstraite et sans contours, d’où la difficulté à lui donner du sens, pourtant, elle est présente dans le corps.

La sophrologie permet une approche douce, efficace et progressive pour avancer et dépasser les crises et évacuer l’angoisse. 

Il est également possible de donner une forme à son angoisse via l’écriture, le dessin ou toute action qui permettra à l’individu de symboliser l’angoisse et de la placer à l’extérieur de soi. C’est notamment l’une des approches que je mets en place lors de séances avec les enfants.

La sophrologie pour mieux traverser et dépasser l’angoisse

La sophrologie est une discipline psycho-coprorelle dont la finalité est d’apprendre à se connecter à soi pour mieux se connaître et ainsi mener une vie plus alignée, plus heureuse. Le travail porte sur le corps et sur l’esprit grâce à un ensemble de techniques simples et efficaces, accessibles à tous.

Mieux se connaître permet de développer sa confiance en soi, son estime de soi. 

La pratique de la sophrologie a une résonnance positive sur le mental, les tensions physiques et tout le pan émotionnel de l’individu.

Dans le cadre de la prise en charge des angoisses, la parole et la verbalisation vont avoir un rôle majeur et permettre au sophrologue de proposer un accompagnement sur mesure.

Apprendre à apprivoiser l’angoisse, l’écouter, la reconnaître, la traverser, la dépasser est possible grâce à :

-Des exercices de respiration

-Des exercices de « relaxation dynamique » qui vont permettre au corps
une remise en mouvement, une circulation et une fluidité intérieure

-De la visualisation

Grâce à la pratique, il est alors possible de se rassurer et d’apprendre à ne pas perdre le contrôle de soi lors d’une attaque de panique.

respiration angoisse

L’individu va, à son rythme, s’approprier les techniques transmises par le sophrologue devenir autonome et s’approprier les outils qu’il pourra mettre en place dans son quotidien.

Petit à petit la confiance va s’installer de nouveau, les crises vont s’espacer.

Le travail de préparation mentale peut également consister en de la visualisation autour de situations angoissantes à priori.

Exercices

La respiration est notre outil le plus précieux pour désamorcer ou traverser une crise de panique. Tous les exercices de respiration peuvent se pratiquer debout, assis(e) ou allongé(e).

  • Grands soupirs : parfois la respiration est totalement bloquée, envisager un « exercice de respiration » à proprement parler est impossible. Dans ce cas, je conseille de faire de grands soupirs plusieurs fois en inspirant par le nez et en expirant pas la bouche. Plus l’expire par la bouche va être longue, plus le calme va être favorisé.
 
  • Respiration apaisante : Inspiration par le nez sur 2 secondes / Expiration par la bouche sur 4 secondes. L’idée est de doubler le temps d’expire VS le temps d’inspire. Plus on est à l’aise, plus on augmente les durées. A son rythme, en douceur.
 
  • Exercice de cohérence cardiaque : Inspiration par le nez sur 5 secondes / Expiration par la bouche sur 5 secondes / le tout durant 5 minutes. Cette respiration va favoriser l’harmonisation des battements du coeur, de la respiration et du système nerveux. Elle est idéalement à pratiquer 3 fois par jour, matin, midi et soir.
 
  • La conscience de son corps a un rôle majeur dans la traverser des crises, plus on connaît son corps, plus on peut l’accompagner. Un exercice de « contracté – relâché » peut aider le corps à évacuer les sensations d’angoisse. On va chercher la contraction musculaire volontaire de tout le corps ou d’une partie identifiée au préalable et en expirant, en dégager les tensions.
 
  • La visualisation a également un rôle majeur. Laisser venir à soi une image de lieu ressource, de lieu dans lequel on se sent en sécurité va favoriser le retour au calme.

=> Toutes ces techniques transmises par le sophrologue demandent de l’entrainement entre les séances. Plus la pratique va être récurrente, notamment en dehors des temps de crise, plus la technique sera efficace au moment d’une crise.

L’angoisse n’est pas une fatalité, elle est le révélateur de messages de l’inconscient.

Qu’elle soit sourde et quotidienne ou qu’elle se manifeste via des crises de panique, il est important d’en parler et de ne pas rester seul(e) avec cette souffrance. La sophrologie est une discipline efficace qui a aidé de nombreuses personnes à dépasser l’angoisse, retrouver confiance en eux et avancer dans leur vie.